Paris, le 23 février 2024
Face à l’état délétère de la psychiatrie en France, il est urgent de soutenir la psychiatrie publique sectorisée. Celle-ci est en toute première ligne du suivi et du traitement des personnes atteintes de troubles psychiatriques. Assurant le suivi ambulatoire (CMP, HDJ, CATTP, équipes mobiles), l’hospitalisation, la prise en charge de l’urgence pour les adultes comme pour les enfants, elle est implantée au plus près du domicile des patients, travaille sur un parcours de soin coordonné en lien avec tous les partenaires du territoire. C’est le tout premier recours du soin psychiatrique, celui qui prend en charge le plus grand nombre de patients et celui qui actuellement à le plus besoin de soutien.
Sous-investissement, absence de vision à long terme, perte d’attractivité, la psychiatrie publique est en crise et se sent délaissée tout comme les patients dont elle s’occupe. Pourtant elle sait rester dynamique et continue d’innover. Alors faisons confiance aux acteurs de terrain de la psychiatrie publique qui ont su s’adapter au défi du doublement de la file active sur les 20 dernières années et à innover malgré les contraintes. Rappelons que ce sont eux qui prennent en charge les pathologies les plus complexes, qui accueillent tous les patients sans discrimination dont ceux qui nécessitent des soins sans consentement et entendons également leur expertise et leur expérience.
Rappelons que la force du dispositif de soins sectorisé français ce sont les 3101 CMP et les 1808 CATTP répartis sur l’ensemble du territoire qui prennent en charge 2,25 millions de patients dont ¼ sont des enfants ou des adolescents*. Laisser penser dans des campagnes de communication que des dispositifs dits « experts » au nombre de 70 pourraient à eux seuls résoudre les difficultés est un leurre si le socle même de la prise en charge effective des patients n’est pas consolidé et continue à s’effriter.
Il est donc primordial de réaffirmer le rôle central des CMP dans l’organisation des soins, de reconnaitre la légitimité de l’expertise des soignants du terrain qui connaissent les besoins des patients et de leurs familles, le contexte social et les enjeux du territoire dans lesquels ils vivent. Les centres experts ont leur utilité et leur pertinence s’ils restent à disposition de ces acteurs en soutenant la prise en charge lorsqu’elle rencontre des points d’impasse et en offrant un plateau de ressources disponibles permettant d’ouvrir des pistes de réflexion clinique et thérapeutique** La complémentarité et la transversalité seront toujours plus efficientes que l’hégémonisme et la verticalité.
Claude FINKELSTEIN
Présidente de la Fédération Nationale des Associations d’usagers en Psychiatrie (FNAPSY)
Marie-Noëlle PETIT
Présidente de l’Association Nationale des Psychiatres Présidents et Vice-Présidents de Commissions Médicales d’Etablissements des Centres Hospitaliers (ANPCME)
Christophe SCHMITT
Président de la Conférence nationale des Présidents de Commissions Médicales d’Établissement de Centres Hospitaliers Spécialisés
Données SAE 2022
**Cf Espi, Pauline, et al. « Organisation des soins en santé mentale : quelle juste place pour les centres experts en
pédopsychiatrie ? », L’information psychiatrique, vol. 99, no. 8, 2023, pp. 551-558.