Lettre ouverte à la Ministre des Solidarités et de la Santé

Madame la Ministre

La communauté médicale du Centre Hospitalier de Jury à Metz, par la voie de ses représentants à la CME, vous alerte sur la crise majeure que traverse notre établissement concernant la démographie médicale et soignante. L’étranglement financier qu’ont subi les établissements psychiatriques tout au long de la dernière décennie, les mesures de débasage (comme notre établissement l’a subi il y a 2 ans), ont érodé nos moyens humains alors qu’en parallèle les besoins de santé mentale se faisaient de plus en plus pressants.

Nous constatons aujourd’hui:

• des conditions de travail pour l’ensemble des personnels qui se dégradent de jour en jour,
avec des changements itératifs de planning et d’organisation
• un turn-over important dans les équipes de soins, qui entraîne une instabilité et une
incohérence dans les prises en charge
• un manque de temps pour se rendre disponible auprès des patients et des familles qui nous
est reproché par les usagers
• un manque de temps pour se coordonner et organiser les soins et les prises en charge
• une charge de travail clinique et administratif de plus en plus importante avec des moyens
en diminution et une démographie médicale et soignante en chute libre
• un flux tendu sur la gestion des lits, un déficit de structures d’aval médico-sociales et des listes d’attente de plus en plus importantes en ambulatoire.

Tout ceci est aggravé dans les unités d’hospitalisation par des conditions d’hospitalisation indignes pour lesquelles une décision de l’ARS pour autoriser la reconstruction du site hospitalier s’est faite attendre pendant plus de deux ans alors que dans le même temps uneclinique privée à but lucratif se bâtissait à proximité de notre territoire d’intervention.

Cette situation entraîne de la pénibilité, de la perte de sens au travail et des conséquences sur la santé des personnes. Elle entraîne le départ de nombreux personnels y compris les jeunes médecins. Notre établissement qui dessert un bassin de population de plus de 400 000 habitants perd chaque jour de l’attractivité. Son personnel médical, soignant et administratif a le sentiment de ne pas être reconnu et entendu dans son expertise de terrain au plus près de la réalité des situations. La trop grande disparité entre le service public à qui on impose des missions et la prise en charge des cas les plus complexes, et l’attractivité du libéral ou du privé à but lucratif sans contrainte aggrave nos difficultés de recrutement.

Les contraintes budgétaires et financières imposées par les gouvernements successifs aux hôpitaux publics et en particulier aux établissements autorisés en psychiatrie est à l’origine de ces maux.

Nous nous associons aux protestations qui actuellement remontent de l’ensemble des établissements autorisés en psychiatrie. Au moment où se dessine la réforme du financement de la psychiatrie, nous demandons que le budget des établissements psychiatriques soit réellement en lien avec les besoins de la population et surtout que leur progression annuelle tienne compte de l’évolution de ces besoins, ce qui n’est plus le cas depuis plus de 10 ans. Nous demandons des mesures efficaces pour retrouver une attractivité avec une revalorisation conséquente des rémunérations des personnels soignants non médicaux et une revalorisation de la grille salariale des médecins praticiens de l’hôpital public

Nous espérons que les actions que vous entreprendrez pour la psychiatrie publique seront à la hauteur des attentes et de la situation catastrophique de notre discipline.

Pour la CME :
Docteur Christophe SCHMITT
Président de la CME

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